30.3.05

La Licence GNU/GPL à la veille de sa seconde révision

Eben Mogler réagit à l'inquiètude des utilisateurs de Linux après le thread lancé par Daniel Carrera (bénévole chez OpenOffice.org) sur la liste d'infos juridiques de la distribution Debian.

Le contributeur s'inquiétait de savoir si des effets de fouchette néfastes n'allaient pas naître de l'incompatibilité entre la GPLv2 et la GPLv3 (qui sera connue d'ici un an ou deux). Une petite explication s'impose: une des grandes caractéristiques de la licence GPL est l'obligation de redistribuer son travail sur le logiciel, afin d'en faire profiter la communauté qui à son tour devra distribuer son travail (et ainsi de suite). La GPL vise à créer ces flux sans possibilité de les bloquer par des restrictions pour la bonne circulation de la base du logiciel et surtout pour son évolution. Daniel Carrera craignait donc que la révision de la GPL et son passage à la version 3 ne devienne une source de rupture dans le développement des logiciels distribués sous GPLv2, et que des effets de fourchette (forks) n'apparaissent (séparation du flux du logiciel en plusieurs canaux régis par différentes licences incompatibles entre elles, et donc morcellement du développement).

Eben Mogler estime qu'il n'y a pas de raison de s'inquiéter outre mesure et que l'équipe de la FSF (Free Software Foundation) fait son travail du mieux possible en tenant compte de tout cela. Voir aussi l'article de Joe Brockmeyer sur le sujet.

L'enseignement que l'on peut tirer de ce tumulte pour peu de chose (finalement), c'est que la communauté veille, et c'est une bonne chose.

The US Supreme Court about P2P Networks


The US Supreme Court heard a case today which involves a lawsuit against Grokster and DreamCast brought by the RIAA and Hollywood (represented in Court by the MGM).

The point of law here is really inchoate offences: facilitating and preparing a crime. And the goal for the Hollywood industry would be to get a verdict against these networks for the crimes committed by some users (in fact, most of them according to the PEW Report).

The verdict is not to be seen before June.

29.3.05

Directive sur les Brevets Logiciels (7)


Tariq Krim nous fait partager un excellent article sur les relations étroites entre les débats actuels sur la Constitution Européenne, et sur la Directive sur la Libéralisation des Services, et notre fameuse directive sur la Brevetabilité des Logiciels.

Ce qui appelle inévitablement des remarques sur le texte de la future Constitution Européenne. On y trouve des informations intéressantes.

On y apprend (car on en doutait parfois) que la Commission doit promouvoir "l'intérêt général Européen" (Article I-25). On peut aussi constater que les rédacteurs de la Convention ont bien insisté sur la responsabilité politique de la Commission devant le Parlement (voir les articles I-25 et I-26) et sur son indépendance structurelle: Article I-25 4°: "Dans l'accomplissement de leurs devoirs, les Commissaires Européens et les Commissaires ne sollicitent, ni n'acceptent d'instructions d'aucun gouvernement ni d'aucun organisme." On est donc rassurés!
Finalement, on y apprend que nous ne sommes pas dans une dictature éclairée, mais bien dans une démocratie, ainsi que nous le proclame la citation choisie par les rédacteurs pour introduire le texte :
"Notre Constitution... est appelée démocratie parce que le pouvoir est entre les mains non d'une minorité, mais du plus grand nombre" Thucydide, II-37.

Canada about to update Copyright Act


Canada is about to update its legislation on Copyright to implement the provisions of the WIPO Treaties of 1996: the WCT and the WPPT (the so-called "Internet Treaties").

Now this really is a good piece of news.

And what about France?

Les contenus Creative Commons à l'honneur


Yahoo! permet aux utilisateurs de son moteur de recherche de trier les résultats de leurs recherches selon que le contenu est sous une licence Creative Commons ou non. Vous pouvez tester la version BETA ici.

Le professeur Lessig s'en est déjà réjoui, et nous avec.

14.3.05

Encore un exemple de brevet abusif


Amazon a reçu, le 8 Mars dernier, l'avis favorable de l'US Patent Office pour le brevet de leur technique de collecte et de traitement des données sur leurs clients.

En effet, Amazon se sert des données tirées des cadeaux achetés par ses clients pour en déduire des informations sur leurs entourages. Le droit américain reconnaît donc un brevet pour une méthode, qui, par son caractère particulièrement abstrait, pourrait permettre à Amazon de poursuivre tous les e-commerçants qui utilisent (déjà) cette technique pour envoyer des mails promotionnels aux dates anniversaires de leurs clients, par exemple.

Il est clair que le but recherché n'est pas de protéger une invention qui n'en est d'ailleurs pas une, mais bien de cloisonner un secteur concurrentiel, en gelant la concurrence, voire en paralysant tous les systèmes promotionnels basés sur la même "idée". Comme le rappelle ZDNet, ce n'est pas la première fois que Amazon utilise le droit de la propriété intellectuelle à des fins autres que celles que nous autres Européens voulons promouvoir.

Amazon n'est pas seule dans ce cas, une autre société Américaine, Catalina Marketing, spécialiste de la promotion électronique, avait réussi à breveter plusieurs "inventions" telles que la méthode pour distribuer des coupons de réduction (ou comment ré-inventer l'imprimante de tickets de caisse), ou encore la fabrication de coupons ciblés grâce à une prédiction du comportement (ou comment ré-inventer le logiciel de traitement de base de données).

Il devient essentiel de sensibiliser les e-commerçants européens sur les risques qu'ils encourent à utiliser des techniques promotionnelles par voie électronique: entre la réglementation stricte sur le spamming et les brevets "pompe à fric" américains, la marge de manoeuvre devient décidément assez restreinte.

12.3.05

Décision de la Cour d'Appel de Montpellier


La décision est désormais disponible en format pdf sur le site Juriscom.

Effectivement, comme il est écrit sur le blog Droit du Divertissement, on attend un pourvoi avec impatience.

Et ce d'autant plus que l'argumentation développée par la Cour d'Appel est loin d'être convaincante:

"Que tout au plus le prévenu a admis avoir toutefois regardé une de ces copies en présence d'un ou 2 copains et avoir prêté des CR (CD-Rom) gravés à quelques copains ;
Attendu qu'on ne peut déduire de ces seuls faits que les copies réalisées ne l'ont pas été en vue de l'usage privé visé par le texte ;
"


Je pense qu'il y a lieu de penser que la Cour d'Appel a pu envoyer un signal fort à la Cour de Cassation à travers cette décision:

Constater qu'il y a eu téléchargement, gravure, et prêt hors du cercle de famille, et déduire dans une formule provocante qu'on "ne peut déduire de ces seuls faits que les copies réalisées ne l'ont pas été en vue de l'usage privé visé par le texte ;" (ce qui a priori est plutôt contradictoire) impose à mon avis une mise au point par la Juridiction Suprême.

11.3.05

Un internaute aurait été relaxé sur le fondement du droit à la copie privée

JB Soufron et les Audionautes annoncent qu'un internaute aurait été relaxé après des poursuites pour téléchargement et partage de fichiers protégés sur le fondement du droit à la copie privée.
Toutefois, cette décision n'est pas encore disponible, et nous attendons avec impatience l'intégralité du raisonnement.
A noter que cet internaute avait téléchargé et copié près de 500 films.

8.3.05

Software patent directive (6)

Still no improvement in the democracy in Europe.

The European Council decided to give a green flag to the project of the now famous software patent directive (in French in Le Monde Informatique).

The endorsed project is the one proposed by the European Commission in May 2004, that is to say that the Council did not pay any attention to all the legislative work which the MEPs have been doing since then. Poland even calls it "its worst nightmare".

The MEPs have now three months to change the project or reject it altogether. As one can point out, this is quite short for such an important issue, considering the (democratic) work that has been done so far by the MEPs in accordance with most national parliaments & governments is now reduced to nothing. They will have to start from scratch again.

It is such a disappointement for the open-source community. Declarations and interviews relate the same state of mind: even Florian Mueller does not seem to believe in a happy ending here, he believes "the hurdle is very high"; Jonas Maebe, an FFII board member, in an "Open Letter to the EU: Constitution, we have a problem", ends up with a question to the MEPs:
" How on Earth am I expected to still believe in this farce? I really do want to believe. Just give me chance to do so..."

Today, the Council presidency admitted that it takes this project as a "non-discussion" item, "so as not to create a precedent which might have a consequence of creating future delays in other processes". This is really frightening because it basically means that:

European Commission + European Council + Microsoft are superior to European Parliament + 10 national governments + 3 national parliaments

A very instructive declaration (from the representative of Poland in the Council) can be read here.

The no-software patent community is now begging the MEPs to make a sensible decision. We need to keep faith in our institutions (or rather in our insitution, the EP). For those who are not convinced yet, here are a few links to keep you up with latest infos and analysis:


Meanwhile, the BSA, the EICTA, Apple, Adobe, IBM, Ericsson, Dell, Alcatel, Microsoft, Nokia et al. can start smoking cigars.

Talking about them, Adobe is annoucing today that it is ready to make a big step towards open source which "has given so much for Adobe" (sic), while it strongly supports the software patent directive which is going to toll the bell for a large part of the open source community. Further, Adobe calls for the open source community to collaborate to help developping their project.

Isn't that called stabbing in the back, and stealing the money in your pocket?

2.3.05

[OPINION] P2P et copie privée: les voix des sirènes


Vous en avez assez des arguments faciles et maintes fois ressassés.

Vous sentez que la situation actuelle est absurde, mais personne ne vous donne ni les bonnes explications, ni les bons arguments. Entre les ardents défenseurs de la copie privée et les diabolisateurs de l'internaute-pirate, la situation devient définitivement manichéenne.


Et vous n'êtes ni un pirate, ni un saint.


Il faut regarder les choses en face. Aucun tribunal n'accepte la défense basée sur le droit à la copie privée. La Belgique s'apprête à faire passer une loi contre l'usage de la copie privée. On commence à voir poindre un mouvement de radicalisation des positions gouvernementales en Europe, face à la montée des contestataires de tout poil. L'argumentation échevelée de certains sur le P2P commence à s'épuiser, ne convainc plus les internautes, et agace les pouvoirs publics.


Même Jean-Baptiste Soufron, désormais convaincu de la nécessité d'une reconnaissance du droit du public en matière de protection intellectuelle, est obligé de recourir à des contorsionnements pour aboutir à ses fins. Et pourtant, lui-même n'a pas toujours été convaincu par sa position actuelle. Vu sur le Forum des Droits sur l'Internet, réponse de JB Soufron à un topic sur le P2P:


" L'exception de copie privée permet à un utilisateur de faire une copie (1) d'une oeuvre tant qu'il agit de façon non-commerciale (2) et dans le cadre du cercle familial. Dans le cadre du P2P, nous sommes dans un système de copies (1) non-commerciales (2). Le seul problème légal du P2P repose donc sur la notion de cercle familial (3). Cette notion a déjà été élargie du strict cercle familial à celui des amis mais on pourrait peut etre l'étendre encore ou carrément la supprimer. C'est en ce sens que je voulais dire que le caractère légal ou illégal du P2P se joue entièrement sur la définition de la notion de public. Si le public des oeuvres échangées en P2P peut etre assimilé à un cercle restreint, c'est immédiatement légal. Sinon, c'est sans doute aujourd'hui illégal. Partagez-vous mon opinion? "


Il faut, de toute façon, se méfier des arguments tirés du droit à la copie privée. L'article L.122-5 du Code de la Propriété Intellectuelle ne prévoit l'usage de la copie privée que pour un usage personnel ou dans le cercle de famille. Un réseau P2P n'est pas un cercle familial, ni même un cercle d'amis. La position des Audionautes ne pourra être justifée que par une décision élargissant le cercle de famille à la terre entière, à défaut d'une loi qui supprimerait la référence au cercle de famille ou l'élargirait. L'une et l'autre sont improbables.


La solution n'est pas là. Elle ne l'a jamais été.


La libre circulation du savoir n'est pas l'excuse à tous les débordements. Piller l'oeuvre d'un artiste musical, faiblement rémunéré par sa maison de disques, n'a rien à voir avec la libre circulation du savoir. La culture n'y gagnera rien. Elle y perdra même.

Pour autant, la proie facile qu'est l'internaute-téléchargeur-pirate a vécu.

La solution n'est donc pas dans l'utopie d'une copie privée pour la Terre entière, mais dans la négociation.

Nous payions hier nos CD 18 Euros. Négocions et essayons d'obtenir moins. 1 Euro le titre, cela revient à 15 Euros l'album. C'est encore un peu cher mais on y gagne quand même. Favorisons la négociation, jouons sur les atouts que nous avons: la vente de DVD musicaux en forte augmentation (ce qui tenderait à prouver que la baisse des ventes de CD n'est pas due qu'au P2P), et la nécessité impérieuse pour les maisons de disques d'aboutir à une solution de diffusion économiquement viable à court terme. Je ne crois pas en la possibilité d'établir une licence légale et payée par tous les internautes, parce qu'elle serait fondamentalement injuste. Et économiquement inefficace.

Saluons les intiatives heureuses quand il y en a. L'apparition des sites de majors proposant des titres à télécharger est une bonne chose. Mais il faut que la concurrence s'étoffe, ou que les FAI se mettent à proposer eux-même des offres de téléchargement musical, car il faut faire baisser les prix.

Il faut arriver à une solution de marché, pas à une solution néo-communiste de communautarisation de la culture.

Poursuivre individuellement les internautes est absurde, promouvoir la copie privée est irresponsable.

Entre les deux, le retour aux lois du marché est la solution. Le poids numéraire et économique que représentent les internautes de tous les pays connectés est l'enjeu.

Nul doute que ce poids serait un atout de choix si nous arrêtions d'écouter les voix des sirènes.